L’arbre généalogique (3ème partie) – triomphe et modernité

Quartiers de noblesse d'Augustin d'Angerville, chevalier de l'Ordre de Malte - © Archives départementales de la Manche

Après le triomphe de la représentation graphique puis de la métaphore végétale, nous avons fait connaissance avec les précurseurs de l’arbre généalogique dans notre précédent article.

Poursuivons son histoire.

Le triomphe de la généalogie et de l’arbre généalogique – XVIIe-XIXe siècles

Dès le début du deuxième millénaire, les familles nobles prennent conscience de l’importance de leur lignage. Et dès la fin du XVIe siècle apparaissent les premiers généalogistes professionnels, chargés essentiellement d’enquêtes de noblesse. À partir du XVIIe siècle, l’intérêt pour la discipline sera renforcé par la nécessité pour les aristocrates – administrative et de plus en plus fréquente – de prouver leur noble ascendance sur plusieurs générations (quatre en général).
Si l’État se satisfait de preuves concernant l’ascendance paternelle (pour l’obtention de charges et de certains  grades dans l’armée), l’Église quant à elle exige des preuves « par quartiers »origine de notre expression actuelle qui désigne une généalogie complète. La définition de l’arbre généalogique dans le « Dictionnaire archéologique et explicatif de la science du blason » (1901) du Comte Alphonse O’Kelly de Galway débute ainsi :

Plusieurs rangs d’écussons, avec cartouches ornés d’inscriptions filiatives, posés sur des branches d’arbre qui partent du tronc planté dans une terrasse. L’Arbre généalogique est nécessaire lorsqu’il s’agit d’être reçu dans un ordre de chevalerie, qui exige des preuves de noblesse, ou d’être admis dans un chapitre noble.

 

Si la représentation de l’arbre, ascendant et utilisant la métaphore végétale, s’impose au XVIe siècle, avec l’imprimerie, c’est au XVIIe siècle que se généralise la représentation par quartiers, telle que nous la connaissons aujourd’hui. La représentation des généalogies se codifie ; le système de numérotation Sosa-Stradonitz se développe. L’héraldique enrichit la restitution graphique des généalogies des familles nobles.

La généalogie pour tous… et objet de moqueries

Asta su abuelo par Francisco Goya - Gallica © BnFAu XIXe siècle, la généalogie se démocratise, et sort du cercle fermé de la noblesse. Si l’on rencontre alors moins de généalogies mythiques, les généalogies de complaisance ne sont pas rares. Christiane KLAPISCH-ZUBER précise dans son livre « L’arbre des familles » : Quand bien même la bourgeoisie triomphante du XIXe siècle s’est approprié le modèle aristocratique, un soupçon de dérision est resté attaché aux préoccupations généalogiques. L’image [de l’arbre, du lignage qu’il présente et de la position sociale qu’il peut affirmer, NDLR] est alors volontiers retournée contre elle-même.

Le succès de la généalogie – qui par ailleurs s’étend alors aux animaux domestiques, comme les chevaux pur-sang – amène inévitablement ses détracteurs à prendre la parole.
La fable de La Fontaine « Le mulet se vantant de sa généalogie » est remise à l’honneur (à lire sur Gallica). 😉

Les évolutions récentes de l’arbre généalogique

Dès le XIXe siècle se multiplient les arbres généalogiques représentés sous forme de schémas ou de diagrammes.

Généalogie de la famille Bonaparte - © musée de la Maison Bonaparte, Ajaccio

Généalogie de la famille Bonaparte - © musée de la Maison Bonaparte, Ajaccio

La généalogie, notamment en réponse à ses critiques, se veut plus rigoureuse, sobre, et se rapproche de la science historique.

La métaphore de l’arbre, toujours présente, reste pourtant le stéréotype de la représentation généalogique, mais de manière plus graphique, moins réaliste et naturelle. Le retour de ce type de représentation est dû d’une part au souci de vérité historique qui prévaut alors, et d’autre part à son caractère plus pratique pour la lecture et l’analyse des liens de famille.

Le généalogiste du XXIe siècle

La métaphore végétale est parvenue jusqu’à nous, en témoignent les modèles d’arbres « artistiques » (c’est une question de goût personnel ;-)) proposés par les logiciel spécialisés. Cette métaphore est aussi employée par la science, comme plusieurs siècles auparavant, pour organiser les connaissances (par exemple, l’arbre du vivant pour restituer la classification des espèces). On trouve même le concept d’arbre généalogique réutilisé dans les domaines les plus surprenants, pour illustrer par exemple l’historique des produits de la marque à la pomme.
Et on observe le retour des généalogies « mythiques ». Mais aux ancêtres bibliques et aux dieux antiques ont succédé les idoles de la jeunesse actuelle, comme un certain jeune sorcier…

Ainsi pour nous généalogistes du troisième millénaire, la représentation de l’arbre généalogique sous sa forme végétale est encore familière. Nous la réservons toutefois soit à la présentation du résultat, « fini », de nos recherches, soit à une restitution artistique de notre arbre de famille.

Les représentations généalogiques sont aujourd’hui plus utilitaires, des outils de travail pour le généalogiste. Ces représentations sont toutefois multiples : sobres diagrammes parcourus de lignes et de cases, roues d’ascendance ou de descendance, tableaux bien pratiques… Dans l’article suivant, nous abordons les différents types d’arbres généalogiques, ainsi que les conventions graphiques actuelles de représentation des généalogies.

Et je vous invite à parcourir les beaux arbres généalogiques de la Bibliothèque Nationale de France :

Arbres anciens sur Gallica (© BNF) dans Arbres généalogiques / Généalogie

 

La citation

« Il en est des hommes comme les feuilles d’un arbre, feuilles de l’olivier, du lanier ou de tout arbre qui conserve toujours son manteau de verdure.
Ainsi la terre porte les hommes comme un de ces arbres porte des feuilles.
Elle est couverte d’homme dont les uns meurent les autres naissent pour leur succéder l’arbre a toujours sa robe éclatante mais vois-tu au-dessous combien de feuilles sèches tu foules à tes pieds ? »

Saint-Augustin

Sources

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